IUT de Reims-Châlons-Charleville

Chrystèle Lerisse (France, 1960)

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Audioguide

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269 photographies en noir et blanc
9 cm x 9cm (sous cadre de 17 cm x 17 cm)
Bande de photographies de 48,50 m.
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Un tour d’horizon entre paysage réel et paysage évoqué.

Dans l’amphithéâtre le plus récent de l'IUT, on peut admirer une œuvre du 1% artistique créée à partir de photographies argentiques noir et blanc. C'est la seule œuvre photographique des 1% de l'URCA (les 1 % photographiques étant relativement rares d’une manière générale).

Il s'agit d'une création de Chrystèle Lerisse, qui porte un sous-titre constat : 269 photographies. Elles sont installées au mur de manière jointive, chacune sous un cadre carré de 17 cm, les photographies elles-mêmes étant également des carrés de 9 cm. Cela crée une ligne horizontale placée dans le couloir qui ceinture cet amphithéâtre circulaire, sur une longueur de plus de 48 mètres. La couleur uniformément noire qui recouvre le béton brut installé par l'architecte met en valeur, par contraste, la dominante de blancs et de gris clairs de cette ligne d’images, et accompagne la technique du noir et blanc argentique qui les caractérise.

Chacune de ces photographies cultive l'incertitude du regard : on peut y voir des formes peu reconnaissables, très floues, qui rappellent des plantes, des herbes, ou des branchages... même si on ne peut pas être totalement sûr de ce qui est représenté. On a l'impression que nous sont proposées des vues à travers le brouillard, où c'est le vide qui domine.

Dans une vidéo, réalisée par Jérôme Joudrain ancien étudiant de l’école d’art de Reims, qui montre l’installation du 1%, un plan fixe propose le texte suivant : « Le regard ne se pose jamais dans un même temps sur plusieurs endroits, d’où le choix et la mise en forme d’un accrochage d’images répétitives, afin que l’œil, au rythme du corps se mouvant, puisse embrasser chaque photographie ». Les 269 photographies sont en effet une répétition de seulement 20 prises de vue, qui s’égrainent au fur et à mesure de leur accrochage de manière aléatoire, avec cependant, dans la partie la plus haute et donc la moins visible pour le public (au bas des escaliers), une répétition plus importante de la photographie la plus proche du monochrome, celle ou le brouillard est le plus présent.

Dans la partie gauche du couloir lorsqu'on est face à l'entrée de l'amphithéâtre, ce bandeau de photographies est doublé, sur le mur qui lui fait face, environ à 2 m, d'une bande de fenêtres, de hauteur équivalente à celle des photographies. On peut y voir un peu du paysage extérieur, mais l’exiguïté de cette sorte de saillie dans le mur ne permet d'apercevoir que le ciel, dont la grisaille fréquente, spécificité du climat champenois, répond en harmonie avec les tonalités des photographies en noir et blanc. Sur l'autre partie du couloir à droite, lorsqu'on a fini de faire le tour de l'amphithéâtre, la bande de fenêtres s’élargit et prend toute la hauteur du mur. On a alors un beau panorama sur le paysage du terroir de Champagne, qui s’étale des premières vignes rémoises, juste au-delà de la route, devenues entièrement citadines avec le temps et l’extension urbaine, jusqu'à la Montagne de Reims à l’horizon, et ses célèbres coteaux. Ce paysage se reflète sur les vitres des cadres, se mélangeant ainsi aux formes que montrent les photographies.

C'est en effet dans ce dialogue, cette relation d'osmose et d'opposition entre le paysage photographié et le paysage réel, ou, comme le dit elle-même l’artiste, « entre le microcosme de l’image et le macrocosme du territoire », que réside le sens de cette œuvre. Une sorte de complémentarité entre la vision pleine et continue de la réalité qu'on voit par les fenêtres, et la scansion régulière des photographies, où règne plutôt l'ineffable et la vacuité, comme pour proposer de l'espace, de la respiration.