Reims Campus Moulin de la Housse

Henri Beauclair (né en 1932)

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Équipement : amphithéâtre.
Architecte : Henri Beauclair (né en 1932),
(cabinet de Marcel Lods).
Date : 1963-1967.
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LA ROTONDE DES AMPHITHÉÂTRES
UFR SCIENCES EXACTES ET NATURELLES

Un bâtiment circulaire massif d’une très grande force expressive, en contrepoint formel avec le reste du campus.

Contexte

La rotonde des amphithéâtres prend place au coeur du campus du Moulin de la Housse. Sa géométrie exprime cette situation. Comme son nom l’indique il s’agit d’un plan centré, non orienté c’est-à-dire un plan dont la composition se caractérise par l’absence de hiérarchie des axes de composition.

Architecture

L’entrée dans ce bâtiment, comme c’est le cas pour tous les bâtiments de typologie centrée, introduit, par le fait même de sa présence en seul point, une contrariété dans la composition.

La solution adoptée ici, particulièrement élégante, consiste en la suppression d’un volume d’amphithéâtre (volume borgne) pour introduire un vide qui permet l’accès au centre de la composition : un cylindre surmonté d’une coupole hémisphérique (caractéristique des rotondes). L’association de ces deux formes géométriques premières (le cercle et la portion de sphère), archaïques, rend cet espace littéralement monumental, renforcé par l’effet que génère la faible lumière naturelle des failles ménagées entre les amphithéâtres, qui parvient très filtrée 1 en ce centre sur les superbes fresques minérales de Raoul Ubac. Ces failles, éclairées naturellement, permettent l’accès aux amphithéâtres, volumes borgnes, massifs, puissants. La composition du bâtiment n’est rendue lisible que par le parcours depuis l’extérieur vers l’intérieur.

L’extérieur, fermé, massif et puissant, ne permet pas d’emblée la lecture de la composition décrite ci-dessus. En revanche y est clairement affirmé le système constructif, comme pour les bâtiments de Lods qui forment le reste du campus autour de cette rotonde, mais à l’opposé dans la démarche.

En effet, si Lods propose des bâtiments préfabriqués à l’ossature optimisée, Henri Beauclair, l’architecte de la Rotonde (associé alors à Lods pour le projet du campus), en privilégiant le béton coulé en place, expose clairement les poutres maîtresses, support des porte-à-faux des amphithéâtres, qui rayonnent depuis le centre de la construction vers l’extérieur, se rejoignant au point le plus éloigné. Très organique, cette structure, comme un squelette, ou une ramification végétale, reçoit la charge des amphithéâtres. Il n’est pas évident qu’elles soient réellement surdimensionnées, mais elles apparaissent comme telles. Cet aspect leur donne une impression de massivité, loin des finesses mises en oeuvre par Lods.

Il y a en effet en ces formes quelque chose de l’ordre du primitif, de l’archaïque, au sens premier, bien en deçà de la réelle technicité nécessaire à une telle construction. Paradoxe de ce bâtiment : l’indispensable technicité pour l’édifier s’efface au profit d’un archaïsme de l’expression.

Il est enfin à noter que les travaux entrepris pour la modernisation des amphithéâtres ont supprimé le mobilier originel, remplacé par un équipement plus moderne, et que les menuiseries fines initiales de l’entrée vitrée ont laissé place à des profils épais qui ne rendent pas service à la subtilité générale du bâtiment.

1 - À l’origine, les baies vitrées qui sont au fond de chacune de ces « failles » (qui ouvrent aujourd’hui sur les voies d’évacuation pompier et inexistantes à l’époque de la construction) étaient fumées pour que le contre-jour vu de l’espace central ne soit pas aveuglant. La mosaïque d’Ubac était donc quasi exclusivement éclairée par les néons placés sous les bancs de béton de l’espace circulaire central (à cet effet aucun luminaire en plafonnier n’avait été prévu - contrairement à celui qui est installé aujourd’hui).

Gaëtan Cadet